lire introduction, titre provisoire » Kill John John – essaim œufs brisés «
“Ce qui est criminel ce n’est pas d’échouer, mais de viser trop bas.”
James Russell Lowell
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Aux bons ouvriers, les bons outils. Bon meurtrier est artisan, manie l’outil avec dextérité (Hy Dexter, everything going bloody?).
Ce moment à l’apex quand l’être trépasse,
il convient de le magnifier, c’est le faîte d’une existence, l’orgasme ultime, consécration instantanée,
hors le temps,
qui condense en un point toutes les énergies d’une vie.
(…) Lors du diner nous avons tant et tant parlé, de nos méthodes, histoires, regrets, pas de remords, et ri mais ri aux éclats, comme c’est bon !
Je m’appelle John John. Vous pouvez m’appeler Dgédgé ou Dgeaidgeai, c’est ainsi que maman me convoquait à table pour manger après la prière ou au salon, afin de mieux me gronder, avant la punition. Rares sont les soirs quand je n’en méritais point, aussi il m’en souvient, au soir de ces journées bénies, j’ai commencé à pratiquer soustractions.
(…)
Regarde bien autour de toi. Tu vois le mec mal attifé avachi sur le siège, siège qui toucha bien plus de cons que tu n’imagines en lécher en une vie de stupre, ce monsieur sent mauvais. Les effluves qui émanent de ses chaussures usées, de son slip mis trois jours, ses aisselles qui n’ont pas vu savon depuis dimanche en 8, écœurant. Objectivement, le monde se portera bien mieux sans ça. Lorsque la chose se lève pour quitter la rame à la rame, station Auber je lui emboite le pas. La tension monte, et avec elle adrénaline oblige, la perception de miasmes. A la fin du tapis roulant, dans le boyau béton qui mène aux magasins et summum, l’Opéra de Paris, nous prenons à gauche par l’ascenseur, pour l’échafaud
C’est vraiment sale, nauséabond, l’odeur du condamné se mêle aux relents compissés des clodos avachis en leurs propres, sales, déjections à l’étage. Il n’est point lieu plus sordides, vous voyez la sortie de l’ascenseur, station Opéra? Cul de sac investi de loques humaines aux sens insensés. Dans la cabine, le gros et moi sommes seuls; j’ai le temps d’imprégner ma haine de son âme blessée, affaiblie, sous bestiale, décadente à la répulsion avant que les portes ne s’ouvrent.
Sur le sol deux oubliés se le sont (oubliés) têtes bêches. L’un agité de soubresauts proférant petits bruits de porcelet bâillonné qu’on égorge, tandis que l’autre ronfle comme un moine. Ils partagent j’imagine un rêve de château en bord de Seine à Chantilly, matinée au practice puis courses à l’hippodrome, c’est d’un ennui, conventionnel, pitoyable. Il ont la liberté de jouir d’icelle, liberté j’écris ton son, et les voilà en manque de conformisme, cadre, règles de « société », contraintes et devoirs castrateurs.
Frustrant. Piteux.
Il me suffit de placer la main à l’arrière du crâne de gras du bide, et comme si j’allais l’embrasser incliner vers l’arrière en tirant les cheveux gras poisseux, puis projeter à toute force contre le mur du couloir.
Ça fait un bruit glauque, une sorte de clac & « scrounch », sa tronche explose littéralement, miettes de cervelle dégoulinantes sur affiche publicitaire. Trois morceaux d’os, frontal occipital et pariétal, et une myriade de fragments descendent lentement vers la rigole qui fait office de pissotière. Les allongés n’ont pas moufté.
Le corps sans tête bascule vers l’arrière, tandis que son sang dégouline en flots pulsés, fumant de chaleur; la saveur; l’odeur âpre métallique du raisiné me monte au palais.
Tout en me fustigeant de prendre tant de risques, je sors un mouchoir de soie et le trempe au sang tiède. Replier précautionneusement. Ranger
dans la boite des lunettes. Les enfiler (les lunettes pas le mouchoir)
Casquette vissée sur cheveux rassemblés
je quitte les tunnels pour l’air et le soleil
mérités.