Aujourd’hui c’est le jour dernier, c’est la fin, c’est un bon jour pour vider de toutes scories compilées, des importuns envahissants accumulés, œuvrer à la grande liquidation des ordures et des déchets.
J’ai trouvé dans ce carnet des noms d’amours perdus, des prénoms usuels usagés, plusieurs titres honorifiques dévalués, des numéros sans abonné; voyant pointer à l’horizon le radeau de la mémoire qui flanche, la méduse au trou sans souffleur, je les arrache d’un geste. Et plutôt que de les brûler et en jeter les cendres sur la falaise à Étretat, juste là au bout de l’étroit promontoire attaché à la terre par un fil de calcaire ténu et qui s’effrite, j’hésite.
Les placer dans une boite à biscuits, se contenter de déshabiller le garde-manger au grenier, et orner l’débarras de l’encas, antre aux regrets fats mélancoliques?
Substantifique essence au terme d’évaporations,
Comme les dernières paroles du patriarche agonisant, sourire crispé sur visage blêmi de douleurs, je psalmodie la liste d’instants avortés, de mythes brisés et de coïts interrompus…
Non point pour quelques-uns quelqu’une, la mémoire comme fondement d’une vie de labeur aux espoirs d’éternité, mais pour les miens semblables, rien de plus que l’instant, et quelques illusions d’artistes, du beau, du fort, de la matière sonore et colorée pour que le néant soit comblé et le grenier rempli.
Ps: j’ai tout gardé, et ce billet vient s’ajouter au tas d’absconses quinconces de questions-réponses.